Ecouter Victor Gélu et se dire que ce poète marseillais du début du 19ème siècle est sacrément d’actualité. « Du petit peuple marseillais – de cette époque, il a tout connu : la misère, les rêves de révolution, les plaisirs, le désespoir devant les transformations d’une ville qui s’agrandit et s’enrichit sans se préoccuper des plus humbles… » Ainsi est présenté Victor Gélu dans le livre CD que l’Ostau dau Pais Marselhés lui consacre.
Massilia Sound System chante Lo Grand Tramblament, aux paroles sans équivoque sur le regard acéré et la vigueur de la langue occitane de Gélu. Extrait
Parole de Lo Grand Tramblament:
Moro, ti donon trenta sòus,
Quand vas debarcar de matiera,
Lei mestres de ta saboniera
Que t’an de lois lei plens pairòus.
Encar ti duves creire uròs
Se ti ronhon pas la jornada !
Lei traitres, emé son tetar-doç,
Ti l’empunhon sensa pomada,
Sensa pomada !
(Traduction)
Maure, ils te donnent trente sous,
Quand tu vas débarquer de la soude
Les maîtres de ta savonnière
Qui ont des louis plein leurs chaudrons.
Encore tu dois t’estimer heureux
S’ils ne te rognent pas sur ta journée!
Les traîtres, avec leur ton mielleux,
Te l’enfoncent sans pommade,
Sans pommade !
M’es de latin, ieu, son babot :
Mon engien de lònga li clava ;
E sovent pensi : qunei cavas !
Jamai ajustar lei doei bots !
Aqueu trafic pòu plus durar :
Fau que sange vò que tot pete !
Lo tròn de Dieu lei va curar ;
Gara ! Que Moro si li mete ;
Voei, si li mete !
(Traduction)
C’est pour moi du latin, leur blabla :
Mon esprit constamment s’y perd ;
Et souvent je pense : quelle histoire !
Ne jamais joindre les deux bouts !
Ce trafic ne peut plus durer :
Il faut que ça change, ou que tout pète !
Le tonnerre de Dieu va les creuser ;
Gare ! Que Maure s’y mette ;
Oui, il s’y met !
Ô vous les grands politiciens qui trustez les antennes,
Vous qui menez la grande course au galop dans la plaine,
Vous tenez nos vies d’une main et il faut qu’on la ferme,
De l’autre vous purgez nos bourses et les vôtres sont pleines,
Joindre les deux bouts est devenu un vrai casse-tête,
Combien de familles d’ouvriers croulent sous les dettes,
Combien de papets sont dans la misère à la retraite,
Vivement qu’un de ces quatre matins déboule,
Lo grand tramblament.
Se jusqu’ara ai agut, rascàs,
La fava sensa joissuras,
Qu’au mens doni ma mordidura
Sus lo roiaume dei richàs !
Ieu siáu juste, pas tot per un !
Es nautrei que lauram la rega,
Puei apanaus e comolum,
V’arrapatz tot ! D’aise colega !
D’aise colega !
(Traduction)
Si jusqu’à cette heure j’ai eu, teigneux,
La guigne sans jouissances,
Qu’au moins je donne mon coup de dent
Sur le gâteau des rois des richards !
Moi, je suis juste : pas tout pour un !
C’est nous qui creusons le sillon,
Puis, boisseau et mesures combles,
Vous empoignez tout ! Doucement, les gars !
Doucement, les gars !
Ô vous patrons et financiers qui grimpez aux échelles,
Vous qui montez et démontez, encaissant à la pelle,
Vous gérez nos vies d’une main et on tient la truelle,
De l’autre vous misez en bourse et partez aux Seychelles,
Quand dans le pays résonne le courroux des précaires ;
Tous vos profits font écho à nos découverts bancaires,
Un sentiment de fatalité lié à la galère,
Vivement qu’un de ces quatre matins déboule,
Lo grand tramblament.
Cu n’a ne’n mete : aquí la lei !
La trompetarem dins la França
En esparpalhant la finança,
Porrà pitar, lo pichon peis.
Se París si vòu pas clinar
L’a lei pegons dei jorns de festa ;
Se Marsilha vòu reguinar,
Brulam lo pòrt, e copa testas !
E copa testas !
(Traduction)
Qui en a en mette ! Voilà la loi !
Nous la trompetterons dans la France !
En éparpillant la finance,
Il pourra mordre, le petit poisson.
Si Paris ne veut pas s’incliner
Il y a les torches des jours de fêtes ;
Si Marseille veut rechigner,
Nous brûlons le port, et coupe têtes !
Et coupe têtes !
Fòra ! Lo sang que nos resta a lo bòlh !
Fòra ! Sangsucs, qu’avètz la gòrja plena !
Fòra ! Bochiers, gras de nòstra codena !
Fòra ! A son torn lo bestiau pren lo foeit !
(Traduction)
Dehors ! Le sang qui nous reste bouillonne !
Dehors ! Sangsues, qui avez la gorge pleine !
Dehors ! Bouchers, gras de notre couenne !
Dehors ! À son tour le bétail prend le fouet !
Quand vas debarcar de matiera,
Lei mestres de ta saboniera
Que t’an de lois lei plens pairòus.
Encar ti duves creire uròs
Se ti ronhon pas la jornada !
Lei traitres, emé son tetar-doç,
Ti l’empunhon sensa pomada,
Sensa pomada !
(Traduction)
Maure, ils te donnent trente sous,
Quand tu vas débarquer de la soude
Les maîtres de ta savonnière
Qui ont des louis plein leurs chaudrons.
Encore tu dois t’estimer heureux
S’ils ne te rognent pas sur ta journée!
Les traîtres, avec leur ton mielleux,
Te l’enfoncent sans pommade,
Sans pommade !
M’es de latin, ieu, son babot :
Mon engien de lònga li clava ;
E sovent pensi : qunei cavas !
Jamai ajustar lei doei bots !
Aqueu trafic pòu plus durar :
Fau que sange vò que tot pete !
Lo tròn de Dieu lei va curar ;
Gara ! Que Moro si li mete ;
Voei, si li mete !
(Traduction)
C’est pour moi du latin, leur blabla :
Mon esprit constamment s’y perd ;
Et souvent je pense : quelle histoire !
Ne jamais joindre les deux bouts !
Ce trafic ne peut plus durer :
Il faut que ça change, ou que tout pète !
Le tonnerre de Dieu va les creuser ;
Gare ! Que Maure s’y mette ;
Oui, il s’y met !
Ô vous les grands politiciens qui trustez les antennes,
Vous qui menez la grande course au galop dans la plaine,
Vous tenez nos vies d’une main et il faut qu’on la ferme,
De l’autre vous purgez nos bourses et les vôtres sont pleines,
Joindre les deux bouts est devenu un vrai casse-tête,
Combien de familles d’ouvriers croulent sous les dettes,
Combien de papets sont dans la misère à la retraite,
Vivement qu’un de ces quatre matins déboule,
Lo grand tramblament.
Se jusqu’ara ai agut, rascàs,
La fava sensa joissuras,
Qu’au mens doni ma mordidura
Sus lo roiaume dei richàs !
Ieu siáu juste, pas tot per un !
Es nautrei que lauram la rega,
Puei apanaus e comolum,
V’arrapatz tot ! D’aise colega !
D’aise colega !
(Traduction)
Si jusqu’à cette heure j’ai eu, teigneux,
La guigne sans jouissances,
Qu’au moins je donne mon coup de dent
Sur le gâteau des rois des richards !
Moi, je suis juste : pas tout pour un !
C’est nous qui creusons le sillon,
Puis, boisseau et mesures combles,
Vous empoignez tout ! Doucement, les gars !
Doucement, les gars !
Ô vous patrons et financiers qui grimpez aux échelles,
Vous qui montez et démontez, encaissant à la pelle,
Vous gérez nos vies d’une main et on tient la truelle,
De l’autre vous misez en bourse et partez aux Seychelles,
Quand dans le pays résonne le courroux des précaires ;
Tous vos profits font écho à nos découverts bancaires,
Un sentiment de fatalité lié à la galère,
Vivement qu’un de ces quatre matins déboule,
Lo grand tramblament.
Cu n’a ne’n mete : aquí la lei !
La trompetarem dins la França
En esparpalhant la finança,
Porrà pitar, lo pichon peis.
Se París si vòu pas clinar
L’a lei pegons dei jorns de festa ;
Se Marsilha vòu reguinar,
Brulam lo pòrt, e copa testas !
E copa testas !
(Traduction)
Qui en a en mette ! Voilà la loi !
Nous la trompetterons dans la France !
En éparpillant la finance,
Il pourra mordre, le petit poisson.
Si Paris ne veut pas s’incliner
Il y a les torches des jours de fêtes ;
Si Marseille veut rechigner,
Nous brûlons le port, et coupe têtes !
Et coupe têtes !
Fòra ! Lo sang que nos resta a lo bòlh !
Fòra ! Sangsucs, qu’avètz la gòrja plena !
Fòra ! Bochiers, gras de nòstra codena !
Fòra ! A son torn lo bestiau pren lo foeit !
(Traduction)
Dehors ! Le sang qui nous reste bouillonne !
Dehors ! Sangsues, qui avez la gorge pleine !
Dehors ! Bouchers, gras de notre couenne !
Dehors ! À son tour le bétail prend le fouet !
Site sur Victor Gélu en français et en provençal
Le blog de l’Ostau dau Pais Marselhes